Feuillet n°001/PPI/DDH-J/11/2018 du 30 novembre 2018 portant Monitoring des violations des droits des défenseurs des droits humains et des journalistes en République Démocratique du Congo.

Au cours du mois de novembre 2018, Partenariat pour la Protection Intégrée (PPI), organisation œuvrant pour la promotion de la paix et la protection des défenseurs des droits humains a documenté seize (16) cas des violations des droits des DDH et des journalistes en RDC. La plupart de ces violations concernent la province du Sud-Kivu et un cas pour la province du Nord-Kivu. Il s’agit de : 1 journaliste agressé, 1 maison de presse scellée et une autre sous menace d’être fermée, 5 DDH arrêtés et relâchés, 7 DDH menacés et 1 DDH enlevé et retrouvé quelques jours après.

  1. Journaliste agressé

Marc BASHONGA : Journaliste et Chef des programmes à la radio télé Yesu ni Jibu (RTYJ Fm), émettant depuis la ville de Bukavu au Sud-Kivu. Il a été agressé par des bandits munis d’armes blanches la nuit du mercredi 21 novembre 2018 vers 19h30 à Nguba à l’endroit communément appelé « Chez Mangaza » dans la ville de Bukavu, alors qu’il rentrait chez lui en provenance de la radio. Fortement blessé à la tête et au visage ainsi qu’au niveau de l’œil droit en particulier, il a été évacué d’urgence et admis dans une formation médicale en dehors de la province du Sud-Kivu où il continue à recevoir les soins.

  1. Maison de presse fermée

Radio IRIBA FM : Mercredi 28 novembre 2018 vers 12h, les journalistes de la radio IRIBA FM ont vu débarquer dans leurs bureaux un officier de police judiciaire accompagné d’autres policiers. Ils ont indiqué qu’ils sont venus sceller la maison de la radio et qu’à l’immédiat les journalistes sont tenus d’interrompre la diffusion de leurs programmes. Interroger quant au motif, ils ont répondu que leur rôle se limite au scellage et que l’ordre serait venu de la haute hiérarchie. Pour l’instant, la directrice de ce média Madame Prisca BUKARABA tente d’entrer en contact avec les autorités judiciaires pour qu’elle soit fixée de la situation, mais sans succès. Signalons que la radio IRIBA FM a été créée par l’ancien journaliste Donado MUSEMA, actuellement cadre d’un parti politique de l’opposition, union pour la nation congolaise (UNC) et pour lequel il est candidat à la députation nationale.

  1. Maison de presse menacée d’être fermée

Radio Svein : Plusieurs plaintes de menaces et pression que subie la radio Svein de la part de certaines autorités provinciales et services de sécurités ont été présentées à PPI. Il sied de noter qu’en dehors de ces menaces, des taxes forfaitaires sont également imposées à ce média par des services de fisc, ce que dénonce son directeur David Honneur SAFARI.

  1. Défenseurs des droits humains arrêtés et relâchés

Me Zozo SAKALI : Président du noyau urbain de la société civile Bureau de coordination, il a été arrêté par la police lors de la manifestation du 19 novembre à Bagira. Il a été conduit à la police de Groupe Mobile d’Intervention (GMI) à Labotte. Quelques heures après il a été libéré après intervention de la MONUSCO et d’autres acteurs de la société civile et organisations de défense des droits de l’homme du Sud-Kivu. Dans les mêmes conditions ont été aussi arrêtés Hippocrate MARUME  Président de noyau de la société civile dans la commune de Kadutu, Benjamin MATABARO, Un certain Gustave et le Président du sous noyau de la société civile de Ciriri. Tous ces DDH indiquent qu’ils ont été torturés par les éléments de la police à bord de leur véhicule qui les a amené de la commune de Bagira jusqu’au cachot de la police à Labotte en commune d’Ibanda, sur une distance d’environ 10Km.

 

  1. Défenseurs des droits humains sous menace depuis le 19 novembre 2018
  1. Valentin BUROKO : Enseignant à l’université libre des grands lacs (ULGL) et Chargé des Programmes au directoire national de la nouvelle dynamique de la société civile (NDSCI). Alors qu’il prenait part à une manifestation organisée par les forces vives de la commune de Bagira dans la ville de Bukavu en date du 19 novembre 2018 pour exiger la démission du Bourgoumestre de la commune, Antoine BISHWEKA NSINANYOFI et toute son équipe accusés de la mauvaise gestion, il a été agressé par la police et une bande de certains jeunes réputés instrumentalisés et drogués par le bourgoumestre incriminé. Jusqu’à présent, il poursuit avec les soins ambulatoires, mais également indique que des menaces pèsent toujours sur lui. Toutefois, notons qu’au lendemain de cette répression, une plainte contre Antoine B. a été déposée par les organisations de la société civile (OSC) et ONGDH de Bagira au Parquet Général de Bukavu pour tous ces faits lui incriminés.
  2. Gentil KULIMUSHI : Président du noyau de la société civile de Bagira. Celui-ci renseigne que depuis les actions citoyennes organisées par les forces vives de Bagira et qui ont conduit à la suspension du bourgoumestre de ladite commune, il ne passe plus la nuit chez lui. En tant que l’un des responsables des organisations ayant menées cette lutte, il est filé chaque présentement par un groupe de plus de sept personnes pro l’ancien bourgoumestre. Il en est de même de certains de ses collègues dont Emmanuel MIKALABA Vice-président du noyau de la société civile en commune de Bagira, David CIKURU Président du noyau de la société civile en commune d’Ibanda, Julien NAMEGABE Président du sous noyau de la société civile du quartier Nkafu dans la commune de Kadutu et Blaise MUSOLE Président du sous noyau de la société civile de Cikonyi en commune de Bagira. Enfin, les mêmes menaces sont aussi orientées envers Alain BAGABO Président urbain de la nouvelle dynamique de ma société civile (NDSCI) ainsi que Me Zozo SAKALI et Hippocrate MARUME précités. Des informations recoupées parvenues à PPI laissent entendre que le bourgoumestre de la commune de Bagira, Monsieur Antoine BISHWEKA suspendu indique qu’il reprend ses fonctions dans tout au plus deux mois et aussitôt réinstallé, tous ces acteurs de la société civile et DDH seront contraints de vivre ailleurs.

 

  1. Défenseur des droits humains enlevé

Lucette SOKI MULEKYA : Coordonnatrice de l’association Femmes pour la Paix et Questeur du Parlement des jeunes du Nord-Kivu, elle a été enlevée dimanche 11 novembre 2018 par des personnes cagoulées qui l’ont surprise au quartier Majengo dans la ville volcanique (Goma), alors qu’elle rentrait d’une manifestation culturelle organisée par son association dans l’enclos de Save the Children. Elle a été retrouvée la nuit du mercredi 14 novembre 2018 vers 23h45’ à Turungu, un milieu périphérique de la ville de Goma, et conduit à l’hôpital Général de Référence de Goma pour des soins appropriés.

Eu égard à cette situation que condamne fermement Partenariat pour la Protection Intégrée (PPI), recommandons ce qui suit :

  1. Aux services compétents de garantir la sécurité aux défenseurs des droits humains et journalistes, surtout en cette période électorale pour leur permettre de bien réaliser leur travail ;
  2. Au conseil supérieur de l’audiovisuel et de la communication (CSAC) de s’impliquer pour la réouverture des programmes de la radio IRIBA FM et que cesse les menaces envers la radio Svein ;
  3. A l’union nationale de la presse du Congo (UNPC), journaliste en danger (JED) et tout au regroupement des médias et organes de presse de redoubler les efforts afin de favoriser la cohésion et la solidarité entre tous les journalistes et maisons de presse, surtout en cette période électorale.